Le texte ci-dessous est un document qui apparait sur le site de la Commission sur les enjeux énergétiques. Certains hyperliens dans la liste des références citées ne semblent pas y être fonctionnels; nous reproduisons ici le document déposé le 22-08-2013, en remettant actifs les liens dans la liste des références.
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Marc Durand, doct-ing. en génie géologique, août 2013
Les hypothétiques gisements d’hydrocarbures non conventionnels au Québec - risques et enjeux
Nous analyserons de façon générale la problématique des gisements d’hydrocarbures de roche-mère dans la première partie de ce mémoire. Dans la 2e partie du document, nous présenterons une analyse spécifique du cas du pétrole dans le shale Macasty à Anticosti. Le document de consultation[1] ne traite pas de la question du gaz de schiste du Québec, mais mentionne p. 71 pour ce type d’hydrocarbure l’impact environnemental des sources non traditionnelles. Pour le pétrole, le gisement d’hydrocarbure Macasty de roche mère d’Anticosti est nommément mentionné; il est inclus dans cette citation « Ces estimations représentent des centaines de milliards de dollars en valeur potentielle et, selon le régime de redevances et la structure de propriété des sociétés d’exploration et d’exploitation, cela pourrait représenter des dizaines de milliards de dollars de revenus pour les Québécois » p.75 réf.[1]. Nous traitons donc ici des gisements de roche-mère, tant de gaz (méthane en grande partie) que de pétrole ; dans le dernier cas, on oublie très souvent que le gaz est également présent dans les gisements de pétrole comme dans le gisement Macasty à Anticosti et qu’il constitue de ce fait un problème majeur.
Partie1 - Les "nouvelles" énergies fossiles: un pont pour la transition énergétique?
Les hydrocarbures de roche-mère (pétrole diffus, gaz de schiste) constituent la nouvelle cible de l'industrie pétrolière. Dans la problématique de la consommation d'énergies fossiles et du réchauffement climatique, on nous présente souvent ces énergies comme un "pont" pour une nécessaire transition vers des énergies plus vertes. Le gaz de schiste, dit-on, serait la ressource dans une étape de transition entre nos énergies de combustibles fossiles classiques, et les énergies renouvelables que l'humanité devra impérativement développer.
Jamais mensonge n'aura été plus gros! Tant de la part de l'industrie que des politiciens qui continuent de véhiculer cette image des plus fausses. Au Québec par exemple pour nommer une commission du BAPE, le gouvernement en lui donnant son mandat l'a intitulé "Développement durable de l'industrie des gaz de schiste au Québec" ; exploiter un combustible fossile, donc non renouvelable, est au départ l'antithèse du développement durable. Les gouvernements ont peut-être beaucoup plus d'experts dont la tâche est de soigner l’image, que d'experts scientifiques.
Qu'en est-il du pont ? La consommation effrénée des combustibles fossiles a amené la planète à dépasser 400ppm de CO2 dans son atmosphère. Toute poursuite de cette hausse entrainera des impacts absolument catastrophiques, y compris des impacts économiques dommageables, reliés entre autres à la hausse du niveau de la mer ; elle pourrait devenir significative d'ici la fin du siècle. L'humanité doit faire un virage complet et urgent dans ses choix énergétiques. Ceci est admis par toutes les parties, sauf quelques irréductibles négationnistes dans la frange la plus à droite chez les républicains américains et parmi une certaine frange conservatrice au Canada. En attendant d'arriver de l'autre côté de cette transition, l'industrie pétrolière voit certaines ressources domestiques de gaz et de pétrole conventionnel se tarir ; elle se lance dans l'exploitation de gisements de plus en plus marginaux. Il y a trois paramètres nouveaux qui entrent alors dans l'équation:
1) Pour exploiter du gaz et du pétrole, il faut aussi en dépenser une certaine quantité, celle qu'utilisent les foreuses, les véhicules de transport, les usines de raffinage, etc.; la proportion pétrole requis pour produire/pétrole produit est relativement faible dans les gisements conventionnels. Cette proportion augmente considérablement dans le cas où il faut fracturer des formations géologiques entières pour en extraire du gaz ou du pétrole, parce qu’ils sont là finement disséminés dans la roche-mère. Il faut maintenant dépenser le sixième ou même le quart de l'énergie qu'on va produire. Exploiter ces hydrocarbures disséminés pollue déjà beaucoup au site d'extraction, avant même que le gaz ou le pétrole soit utilisable.
2) À cela s'ajoute le fait que ce sont des étendues de plusieurs milliers de Km2 qu'il faut perturber pour exploiter, car la ressource est diffuse et finement disséminée dans toute l’étendue d'une couche géologique. Ce ne sont plus des gisements localisés qui sont exploités, mais des régions entières qui en subissent les impacts.
3) Finalement le troisième élément nouveau à prendre en compte n'est pas le moindre: l'efficacité de l'extraction. Dans les gisements de pétrole et de gaz conventionnels, les hydrocarbures sont trouvés dans des concentrations naturelles, des pièges en quelque sorte localisés dans des zones ou des strates poreuses et perméables. Le pompage est facilité par cette condition naturelle du gisement; l'efficacité de l'extraction est élevée, car le pétrole et le gaz circulent facilement. Le taux de récupération est aussi très élevé: 50 à 95%. En fin d'extraction, les conditions souterraines (hydrogéologiques notamment) du site sont sensiblement celles qu'elles étaient avant l'implantation des forages; la seule différence notable est qu'il y a dans la strate moins de pétrole et de gaz après qu'avant. Dans le cas d'hydrocarbures de roche-mère, l'exploitation n'est possible qu'en apportant une modification extrême de la strate; l'imperméabilité qui emprisonnait les hydrocarbures depuis des centaines de millions d'années doit être radicalement modifiée. La fracturation artificielle change de façon irréversible la perméabilité de la roche. Le pétrole et le gaz commencent alors à s'écouler par ces nouvelles fractures ouvertes. Cet écoulement est rapide initialement, mais il diminue rapidement et de façon significative. Après quelques années, il ne fournit plus un débit rentable.
Les gisements conventionnels que la nature a créés se sont formés par le même phénomène d’une lente migration de gaz et de pétrole au cours de siècles, plutôt de milliers, voire de millions d'années. Créer des fractures nouvelles dans une strate de roche-mère en un instant donné amorce ce même processus, mais ne le change pas fondamentalement ; il n'est pas possible de l'accélérer. L'efficacité de l'extraction se limite à une petite portion de ce que contient la roche-mère. Le taux d'extraction mesuré dans l'industrie du gaz de schiste est de 10 à 20 % du méthane en place. Pour le pétrole dans le shale, c'est un taux dix fois moindre: 1 à 2% du pétrole en place est récupéré pendant les quelques années où le débit est satisfaisant. Que se passe-t-il ensuite? Le gaz (80%) et le pétrole (98%) qui restent continuent lentement à migrer dans ce shale transformé par la fracturation. Il n’y a aucune possibilité en fin d’exploitation d’arrêter ce processus ; on ne peut que boucher le conduit des puits, mais on ne peut intervenir sur le grand volume (entre 50 et 150millions de m3/puits) du roc rendu très perméable et fracturé.
Il y a donc là, entre l’avant et l’après exploitation une différence radicale qui n'existait pas dans le cas des gisements conventionnels. L'extraction partielle d'une nouvelle source étendue de combustible fossile ne sera pas sans conséquence: l'écrémage de ces hydrocarbures laissera en place des quantités énormes de méthane dans des strates radicalement transformées. Ce gaz pourra trouver des voies de circulation vers les nappes phréatiques, mais également vers l'atmosphère, par les fractures et après un certain temps par les conduits mêmes des puits abandonnés. Ce n'est pas le scellement des puits en fin de production qui va changer la donne; ces scellements ont des durées de vie bien moindre que ce qui serait requis [2]. Ouvrir toutes ces nouvelles sources d'émission de méthane, un gaz à effet de serre autrement plus nocif que le CO2, va contribuer au réchauffement climatique avec une ampleur significativement plus élevée que la combustion des combustibles fossiles conventionnels. On sait maintenant que les fuites existent déjà dès les premières années, celles où les opérateurs contrôlent les puits ; d’après les premiers estimés les fuites représentent jusqu’à 9% de la production [3]. Ces fuites vont continuer bien longtemps après que la production aura cessé.
Ces trois conditions modifient considérablement la perspective dans laquelle il convient d’aborder la poursuite de l'exploitation des énergies fossiles contenues dans les sources non conventionnelles. L’exploitation des hydrocarbures roche-mère ne constitue aucunement un « pont » ou une transition, mais un énorme bond en arrière:
Échelle de pollution: le pire à gauche, le plus vert à droite:
Passer de (2) à (1) pour aller vers (3) est une aberration, certainement pas un "pont". Faut-il exploiter jusqu'à les dernières gouttes de pétrole sur terre, simplement parce que des exploitants pourront y trouver une rentabilité à court terme? "La civilisation a évolué par des étapes significatives souvent en fonction des ressources et des techniques, mais quand l'humanité a quitté l'âge de pierre, ce n'était pas par manque de pierre" [1].
[1] Une reformulation d’une citation attribuée au ministre saoudien du pétrole lors du premier choc pétrolier.
Partie 2 – Les gisements hydrocarbures non conventionnels au Québec
Le gaz de schiste dans l’Utica et le pétrole diffus dans le shale Macasty à Anticosti ont cette particularité commune : contenir des hydrocarbures diffus dans toute leur masse. La fine porosité et la très faible perméabilité de ce shale (Macasty et Utica sont deux entités stratigraphiques équivalentes dans le temps géologique) emprisonnent de façon efficace les hydrocarbures depuis 450 millions d’années. En mesurant l’épaisseur et la superficie du shale, ainsi qu’en estimant le pourcentage de matière organique transformée en hydrocarbure dans la roche, on est arrivé à estimer qu’il y aurait un peu plus de 40 milliards de barils (= 7 milliards m3) de pétrole à Anticosti.
Il est tout à fait irresponsable de multiplier les quantités d’hydrocarbures en place par la valeur actuelle d’un baril de pétrole ($100 x 40 milliards !) comme on a jusqu’à maintenant eu tendance à le faire dans bien des milieux. Une faible portion de ces hydrocarbures serait éventuellement récupérable par fracturation hydraulique : 1 à 2% dans le cas du pétrole dans le shale, c’est-à-dire dix fois moins que le taux de récupération (10 à 20%) dans le cas du gaz de schiste.
Malgré ce faible taux de récupération, le pétrole de roche-mère est actuellement en production au Dakota Nord et il y crée un « boom » économique. Certains rêvent de reproduire ce boom de production au Québec dans un gisement du même type à Anticosti. Mais il faut bien réaliser que c’est en raison de législations permissives et au détriment de l’environnement que les coûts d’extraction et de transport rendent possible cette production dans certains États américains.
Le document de présentation de la CEÉQ [1] reprend pour le pétrole du Macasty des estimés très optimistes (ex. : taux de récupérationde 2 à 5%) qui sont en fait ceux qui sont avancés par les promoteurs privés. L’étude commandée par Pétrolia [4] de laquelle on a tiré l’estimé des volumes de pétrole en place mentionne pourtant, en introduction comme en conclusion, qu’on n’a pas observé de pétrole liquide dans aucun des 20 forages analysés :
« No moveable oil has yet been discovered within the Macasty Formation on the island » p.2, réf. [4]
« no oil or gas has yet been recovered from the Macasty shale through testing » p.8, réf. [4].
Le gisement pétrolier dans le shale Bakken au Dakota est souvent cité comme exemple. Il possède une différence fondamentale avec le Macasty : c’est un gisement qui était exploité de façon conventionnelle avant l’introduction de la fracturation hydraulique en 2008. C’était déjà un champ de production de pétrole marginalement productif ; on avait donc là des preuves bien concrètes de la présence de beaucoup de «moveable oil».
Depuis 2008, on a déjà foré plus de 9000 puits dans le Bakken et ce nombre pourrait atteindre à terme 50 000 puits. C’est un gisement plus étendu que celui d’Anticosti et le volume en place de pétrole est estimé à dix fois la valeur du Macasty. Nous avons là bien plus de données que celles fournies par l’analyse de 20 puits dans la référence citée [4]. Le taux de récupération dans le Bakken est 1,2% comme l’indique le tableau ci-dessous tiré de la référence [5].
Tableau 1. Paramètres des principaux gisements de pétrole de roche-mère aux USA, Sandrea 2012, réf. [5].
À l’exception du gisement Elm Coulée, la majorité des valeurs de taux de récupération sont de cet ordre. Pour le gisement potentiel d’Anticosti dans lequel il n’y a pas encore aucun forage ayant permis de récupérer du pétrole liquide, il est totalement irréaliste de tabler sur un taux de récupération plus du triple («… 2 à 5 % seraient récupérables avec les techniques actuelles» [1] p.74) de celui qui est calculé dans le Bakken.
En fonction des caractéristiques géologiques du gisement du shale Macasty, des données fragmentaires qu’on peut comparer à celles des autres gisements de pétrole de roche-mère aux USA, la valeur réaliste et prudente d’un taux de récupération à prendre en compte à cette étape de l’analyse serait plutôt 1%. C’est cette valeur que nous utiliserons dans la suite du texte.
Un grand laxisme dans la réglementation locale du Dakota permet le brulage à la torchère du gaz associé au pétrole dans le gisement Bakken. Près du tiers du gaz extrait est brulé sur place; c’est une quantité qui représente 260,000 millions de pi.cu/jour [6]. Cette situation résulte du manque de capacité des gazoducs en place, du faible prix du gaz et des distances de transport vers des débouchés potentiels. Seul le pétrole intéresse les exploitants.
Qu’en serait-il à Anticosti où il n’y aurait bien moins de possibilités économiques envisageables pour transporter et commercialiser le gaz? La réglementation actuelle au Québec à propos du torchage n’est guère reluisante, même en la comparant à celle du Dakota :
« Aucune redevance n'est exigible sur le pétrole, le gaz naturel ou la saumure utilisés sur place par le locataire à des fins de forage ou de production ou sur le gaz naturel brûlé à l'air libre.» [7]
On constate que le torchage sur place bénéficie par la loi du Québec d’un avantage économique pour le producteur de pétrole : on peut le bruler gratuitement.
Les estimés des quantités de gaz associé au pétrole dans le shale Macasty n’ont pas beaucoup retenu d’attention, car le gaz présente peu d’intérêt économique dans ce contexte insulaire. Les estimés relatifs au gaz n’ont pas été faits par les promoteurs, mais cela ne veut pas dire qu’on ne peut pas en faire.
Figure 1. Gisements de roche-mère VS gisements conventionnels (modifié de la réf. [8]).
Le gaz et le pétrole qui se séparent dans les gisements conventionnels, sont à l’origine intimement associés et présents dans la roche-mère (figure 1). Il n’est pas possible en exploitant les gisements non-conventionnels de n’extraire que le pétrole, sans le gaz. En fait la fracturation va libérer bien plus facilement le méthane que le pétrole, dans un gisement comme le Macasty.
Tableau 2. Rapport Gaz/Pétrole dans le shaleMacasty réf. [9].
Des données certes fragmentaires (tableaux 2 et 3 ci-dessus) montrent que le rapport gaz/pétrole pour le Macasty (40,9/27,8 = 1,47) est plus du triple que celui mesuré dans le Bakken (16,6/42,7 = 0,39). Nous avons présenté dans la conférence [8] les estimés pour la quantité de gaz dans le gisement Bakken; le volume de méthane (52 Gm3) [note 1] est le double de celui du pétrole (25 Gm3). Les volumes de gaz sont présentés aux conditions standards ; dans la roche-mère le méthane occupe un volume bien moindre car il est fortement comprimé. Il est raisonnable d’estimer à cette étape-ci le volume de méthane dans le Macasty à une valeur entre trois à huit fois celle du pétrole en place, qui lui est évalué à 6 Gm3.
Dans la fracturation de la roche-mère pour libérer les hydrocarbures emprisonnés, le gaz se libérera bien plus rapidement que le pétrole et en plus grande proportion de ce qui est en place (~1% du pétrole en place - vs - 10 à 20% du méthane en place). Pendant et surtout après l’exploitation des puits, le méthane résiduel continuera sa migration vers les nappes et l’atmosphère [11 & 12].
Il y a de plus pour Anticosti une question technologique et environnementale qui pose un problème majeur : le shale Macasty se situe de 350 m à 1100 m pour les quatre cinquièmes de l’île ; cette portion devrait être à priori exclue des estimés et de l’exploration-exploitation. Dans toute cette zone, cette trop faible profondeur ne respecte pas les normes tacites que l’industrie a elle-même proclamées [13]. Dans la section 11.4.1 concernant le pétrole du document de consultation [1], le gouvernement annonce de bien belles intentions, mais il propose [14] en même temps une réglementation pour la protection des nappes qui contredit de façon flagrante tous ces principes. On y définit des conditions pour des forages d’exploration des conditions à respecter pour des demandes futures de permis de fracturation ; une normede 400 m taillée sur mesure pour lever l’exclusion virtuelle qui affecte les quatre cinquièmes de l’île d’Anticosti.
Permettre la fracturation dans une tranche de 400 m de roc qui se situe entre la section horizontale d’un puits et le bas d’une nappe, c’est permettre en fait de conserver zéro mètre de marge de sécurité quant cette fracturation s’étends sur 400 m ! Les données de l’industrie montrent que des fracturations peuvent s’étendre vers le haut jusqu’à plus de 500 m [15]. Le chapitre V du règlement [14] doit être enlevé et toutes les questions relatives à l’exploitation des hydrocarbures de roche-mère doivent être analysées dans leur ensemble. La fracturation et la libération du méthane qui en découlent affectent les nappes phréatiques mais pas seulement les nappes, l’atmosphère également, le bilan des gaz à effet de serre, etc. Il est prématuré de fournir maintenant à l’industrie des normes et des directives laxistes, qui ont l’apparence d’avoir été conçues avant tout pour une question de faible profondeur du shale à Anticosti.
La rentabilité d’une industrie de pétrole de roche-mère à Anticosti semble en elle-même bien douteuse [note 2] ; 1% comme taux de récupération de 46 Gbarils en place, c’est 460 millions de barils récupérables, pour toute l’île. Or seulement un cinquième du gisement se situe à une profondeur suffisante, ce qui laisse~100 millions de barils récupérables, sur environ 1500km2. Il faudra construire 3000 puits pour cette seule partie du gisement. Il est réaliste d’estimer à $10millions/puits le coût de cette exploitation partielle. C’est donc $30 milliards de travaux à faire en construction de puits pour cette seule portion sud de l’île. La valeur marchande de 100 millions de barils à $100/baril rapporterait $10 milliard brut, mais il y aurait $30 milliards de dépenses! Même en rognant sur les coûts des puits et sur leur nombre, il est difficile de voir où se situeraient la contribution d’Anticosti dans l’énoncé suivant : «Ces estimations représentent des centaines de milliards de dollars en valeur potentielle et, selon le régime de redevances et la structure de propriété des sociétés d’exploration et d’exploitation, cela pourrait représenter des dizaines de milliards de dollars de revenus pour les Québécois». Pour être rigoureux, il faut préciser que cette citation se rapporte à cinq gisements chiffrant des réserves potentielles de valeurs non comparables, mais la valeur mentionnée pour le gisement d’Anticosti est la plus élevée dans le lot (réf. [1], p. 75) ; elle est totalement irréaliste.
Nous avons ci-dessus une analyse très sommaire des coûts, nous le reconnaissons, mais elle vaut autant que bien d’autres tout aussi simplistes. Il faudrait tenir compte des coûts environnementaux et pas seulement des coûts des travaux d’exploitation.
Nous reprenons ici comme conclusion la dernière figure de la conférence présentée le 30 janvier 2013 [8].
[1] Gm3 indique : milliards de mètres cubes.
[2] La rentabilité à l’étape de l’exploration pour un détenteur de permis est bien distincte de la rentabilité d’exploitation proprement dite. Les dépenses à l’étape d’exploration sont fortement subventionnées et celles-ci contribuent beaucoup à la valorisation des actifs.
Références :
[1] CEÉQ 2013. De la réduction des gaz à effet de serre à l'indépendance énergétique du Québec - Document de consultation, 84 p.
[2] Brufatto et al 2003. From Mud to Cement—Building GasWells, Oilfield Review, Sept 2003, pp 62-76.
[3] Cooperative Institute for Research in Environmental Science 2013. « CIRES and NOAA scientists observe significant methane leaks in a Utah natural gas field » CIRES News Release 5 août 2013.
[5] Sandrea, 2012. Evaluating production potential of mature US oil, gas shale plays. Oil & Gas Journal, déc. 2012.
[6] Scheyder 2013.Bakken Shale Flaring Burns Nearly One-Third Of Natural Gas Drilled, New Study Finds. Huffington Post Huffington Post 29 juillet 2013
[7] Québec 2013. Loi sur les mines, chapitre M-13.1 (voir l’article 204)
[8] Durand 2013. Les risques et enjeux de l’exploitation du pétrole de roche-mère d’Anticosti. Conférence présentée à la Salle des Boiseries de l'Université du Québec À Montréal le 30 janvier 2013.
[9] Martel 2012. A Comparison of Two Utica Shales: Eastern OhioVersus Anticosti, Quebec, p.13.
[10] Wind River 2012. Core data release. lien.
[11] Durand 2011. L’expérimentation – . La durée de vie des structures.
[12] Durand 2012. Les dangers potentiels de l’Exploitation des Gaz et Huiles de schiste - Analyse des aspects géologiques et géotechniques. Rapport final du Colloque du Conseil régional Île-de-France, 7 février2012, Paris Colloque du Conseil régional Île-de-France, pp 173-185.
[13] Fisher 2010, . Data Confirm Safety Of Well Fracturing, The American Oil and gas Reporter, July 2010.
[14] GAZETTE OFFICIELLE DU QUÉBEC, 29 mai 2013. Règlement sur le prélèvement des eaux et leur protection. texte du règlement déposé le 29 mai 2013.