lundi 17 avril 2023

Question de coût

J'ai ajouté une question sur les coûts de gestion des puits aux USA. ChatGPT accepte de donner une estimation assez honnête à cette question:






ChatGPT redonne ce qui existe comme écrits sur les puits abandonnés

Comme c'est le sujet de l'heure, j'ai interrogé l'Intelligence Artificielle de l'heure (CharGPT une version grand public de l'IA). Je sais que ce robot conversationnel a été entrainé avec les millions de pages de textes qui ont été écrits sur un nombre incalculable de sujets. Le robot n'est donc pas un ignorant, même quand on aborde un sujet pointu et très spécialisé.

J'ai voulu vérifier ce qu'il pouvait fournir comme réponse sur la question des fuites des puits d'hydrocarbures. Je dois dire en premier lieu qu'en douze ans dans ce dossier, j'ai à peu près jamais pu obtenir des réponses sensées, sans faux-fuyants, des rares interlocuteurs spécialistes de l'industrie avec lesquels j'ai pu échanger. Il était manifeste à l'époque que ces spécialistes de l'industrie, mes interlocuteurs éventuels, avaient pour consigne de ne pas discuter publiquement de ces questions. J'ai donc été étonné, mais pas complètement surpris, de constater que les questions techniques et les constats d'expert que j'ai fait sur la question de la détérioration des puits abandonnés en fin de production, n'ont jamais été contestés par des experts de l'industrie*. 

ChatGPT n'a pas montré ce type de limitations dans la discussion que j'ai engagé. Il a livré un condensé des propos tenus tant par l'industrie que par les autorités qui réglementent cette industrie. Il répète beaucoup qu'avec des bonnes techniques, de la réglementation et de la surveillance, la question des fuites pourra être gérée. Poussé dans ses retranchements par ma dernière question où j'indique que dans la réalité, ces voeux pieux sont rarement appliqués, ChatGPT l'admet et concède qu'il reste beaucoup à faire. Il y a dans cette dernière partie de l'échange des indices que des textes écrits par des environnementalistes ont également été retenus dans l'apprentissage de ChatGPT.

Je vous laisse constater par vous-même la teneur de cet échange:

En conclusion, l'intelligence artificielle n'a pas de solution miracle pour l'insoluble question des puits abandonnés; elle est capable cependant de tenir une conversation très correcte sur le sujet, en reformulant ce que des interlocuteurs humains optimistes ont déjà écrit sur la question.

Finalement j'ai posé une question sur les coûts de ces puits. Là sa réponse est moins optimiste.

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* À l'exception des deux débats techniques auxquels j'ai participé. Hélas ces débats n'étaient pas sur le même terrain: mes opposants s'étant abstenus de véritable discussions techniques. Ils se sont
limités à vanter les bienfaits d'une industrie créant des emplois, etc.

vendredi 10 mars 2023

GNL Québec devant un tribunal d'arbitrage de la Banque Mondiale

On pourrait légitimement penser que la saga GNL Québec s'est terminée en février 2022 quand l'Agence fédérale d'Évaluation d'Impact a entériné son rapport qui confirmait les conclusions auxquelles le gouvernement du Québec était lui-même arrivé en 2021. Ce n'est hélas pas le cas. Le journaliste Pascal Girard de Radio-Canada nous apprenait le 10 mars 2023 que les promoteurs de GNLQ et de Gazoduq venaient de déposer une plainte au Centre international pour le règlements des différents relatifs aux investissements (CIRDI) de la Banque Mondiale. Le réclamant, Ruby River Capital LLC, invoque les deux accords économiques liant le Canada et les États-Unis : North American Free Trade Agreement (ALÉNA) et l'accord plus récent du 1er juillet 2020 United States-Mexico-Canada Agreement.

Cette histoire commence à ressembler à ce qui s'est passé avec la compagnie Lone Pine Ressources qui avait déposé à l'ALENA une poursuite de 119 millions U$ contre le gouvernement du Canada. Cette fois-ci la réclamation atteint 20 milliards U$. Ces accords commerciaux continuent donc de servir de contre-pouvoir face aux décisions environnementales des gouvernements élus. Même si ces poursuites par leur caractère manifestement outrancier ont peu de chance de rapporter les sommes réclamées, elles exercent néanmoins une forte pression sur les gouvernements pendant les très longues années que durent ces procédures.

mercredi 22 février 2023

La poursuite Lone Pine VS Canada - décision finale rendue

La justice est lente, mais elle est arrivée à donner un résultat satisfaisant dans le cas d'une poursuite consécutive à une loi du Québec entrée en vigueur en juin 2011.

En 2011 Junex détenait quatre permis d'exploration d'hydrocarbures le long du fleuve St-Laurent. Pour cette exploration, Junex a fait des ententes avec l'albertaine Canadian Forest Oil, qui deviendra peu après (septembre 2011) Lone Pine Ressources Inc. 

Les quatre permis détenus par Junex en 2011  (image tirée de Affaires mondiales Canada).


L'Assemblée Nationale du Québec adopte la loi 18 qui entre en vigueur le 13 juin 2011 "Loi limitant les activités pétrolières et gazières". Ce texte de loi constitue un modèle de concision et de précision; il ne comporte que cinq articles. Ils ont pour but de révoquer la portion des permis d'exploration qui se situent sous le fleuve St-Laurent et les îles qu'il comporte.

L'article 4 précise qu'il n'y aura "aucune indemnité de la part de l'État". Ce seul petit article revêt une importance capitale.

Évidemment, l'industrie pétrolière et les détenteurs de permis ont menacé l'État de poursuites. Leur contestation choisit de prendre un moyen indirect pour lutter contre la disposition de révocation de permis sans compensation. Lone Pine Resources Inc est une entreprise dont le siège social est en Alberta et ses activités sont au Canada. En raison d'avantages divers, cette entité (LPRI) est cependant enregistrée au Delaware. LPRI lance en février 2015 une poursuite devant le tribunal d'arbitrage de l'ALENA contre le Canada en espérant avoir un bon angle d'attaque en passant par les dispositions du chapitre 11 de l'ALENA, 

Le 21 novembre 2022, le tribunal d'arbitrage rend finalement sa décision. La poursuite de 118,9M U$ est rejetée. L'État n'a pas de compensations à payer pour l'annulation de permis d'exploration d'hydrocarbures, car la loi qui abroge les permis d'exploration n'est pas arbitraire. Le tribunal reconnait que la loi a été votée pour le respect du bien public et de l'environnement. C'est un précédent remarquable qu'aurait pu suivre le gouvernement du Québec à Anticosti, ainsi que plus récemment lors de sa décision d'offrir des compensations pour l'abrogation des permis. Le gouvernement a offert et donné des dizaines de millions de dollars pour des compensations qui sont injustifiées

Le principal motif invoqué par les requérants pour justifier leurs demandes monétaires faramineuses étaient reliés à la "perte de profits anticipés" pour l'extraction du gaz ou du pétrole. On peut également penser que les poursuites, et même les simples menaces de poursuites de ce type, visaient surtout à empêcher les gouvernements d'introduire des lois limitant l'activité de l'industrie extractive. Tout cela s'est déroulé entre 2011 et 2022 avec une très intense activité de lobby auprès des ministères, tant à Québec qu'à Ottawa. À certains moments ce lobby a réussi à influencer très efficacement les gouvernements. Par contre ces derniers ont eu aussi affaire à une opposition citoyenne de mieux en mieux informée. Les gouvernements ont eu des valses hésitations d'un côté et de l'autre. La longue suite des décisions des ministres guidés par leur cohorte de hauts fonctionnaires* dans le dossier hydrocarbures montre un manque de cohérence flagrant. Il en a résulté un bilan très lourd en gaspillage inutile de fonds publics. Lorsqu'on compare la loi 18 de 2011 et celle plus récente d'avril 2022, on constate ce manque de cohérence dans la politique des indemnités.

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* Des "experts" au MERN et MELCC ont utilisé les portes tournantes, passant du gouvernement au lobby, etc.  Dans les documents annexés à la poursuite de LPRI, il y a vers la fin de la liasse un document daté du 8 novembre 2012. Il contient des détails assez intriguants sur le rôle qu'aurait joué des hauts fonctionnaires (MM Sauvé e t J-Y Laliberté du MERN), du moins des promesses assez favorables faites à Junex et LPRI (voir p. 12 du document intitulé "Notice of intention to submit to Arbitration under chapter eleven of the North Americam Free Trade Agrement").

Le centre Québécois du Droit de l'Environnement (CQDE) avait obtenu le 10 septembre 2017 la permission de déposer un mémoire à titre d'ami de la Cour.